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fice de la vie. Tous les jours le joueur immole son honneur et supporte la vie. Le joueur est âpre, il est stoïque, il triomphe froidement, il succombe froidement ; il passe en quelques heures des derniers rangs de la société aux premiers, dans quelques heures il redescend au point d’où il était parti, et cela sans changer d’attitude ni de visage. Dans quelques heures, sans quitter la place où son démon l’enchaîne, il parcourt toutes les vicissitudes de la vie, il passe par toutes les chances de fortune qui représentent les différentes conditions sociales. Tour à tour roi et mendiant, il gravit d’un seul bond l’échelle immense, toujours calme, toujours maître de lui, toujours soutenu par sa robuste ambition, toujours excité par l’âcre soif qui le dévore. Que sera-t-il tout à l’heure ? Prince ou esclave ? Comment sortira-t-il de cet antre ? Nu, ou courbé sous le poids de l’or ? Qu’importe ? Il y reviendra demain refaire sa fortune, la perdre ou la tripler. Ce qu’il y a