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fluence. Vous déjà si triste, si découragée, vous qu’il ne faudrait entretenir que d’espoir et de douces promesses, vous voilà sous le contact d’une existence flétrie et désolée. Car cet homme est desséché par le souffle des passions, aucune fraîcheur de jeunesse ne colore plus ses traits pétrifiés, sa bouche ne sait plus sourire, son teint ne s’anime jamais ; il parle, il marche, il agit par habitude, par souvenir. Mais le principe de la vie est depuis long-temps éteint dans sa poitrine. Je suis sûr de cela, Madame, j’ai beaucoup observé cet homme, j’ai percé le mystère dont il s’enveloppe. S’il vous dit qu’il vous aime, il ment ! Il ne peut plus aimer.

Mais celui qui ne sent rien ne peut-il rien inspirer ? C’est une terrible question que je débats depuis long-temps, depuis que je vis, depuis que je vous aime. Je ne puis me décider à croire que tant d’amour et de poésie émane de vous sans que votre ame en recèle le foyer. Cet homme jette tant de froid par