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tous. L’ambition, seul ressort d’une époque sans croyance, annihilait la noblesse mâle et caractéristique, départie à chacun d’eux, pour les confondre tous dans un type de beauté grossière et sans prestige. C’étaient bien encore les hommes de fer du moyen-âge ; ils avaient le regard fauve, les pensées fortes, le bras robuste, la soif de la gloire et le goût du sang, tout comme s’ils se fussent appelés Armagnac et Bourgogne. Mais à ces larges organisations que la nature produit encore, manquait la sève de l’héroïsme. Tout ce qui le fait naître et l’alimente était mort : l’amour, la fraternité d’armes, la haine, l’orgueil de la famille, le fanatisme, toutes les passions personnelles qui donnent de l’intensité aux caractères, de la physionomie aux actions. Il n’y avait plus pour mobile de ces âpres courages que les illusions de la jeunesse détruites en deux matins, et l’ambition virile, têtue, sale, déplorable fille de la civilisation.