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voudrais bien croire à quelque chose, ne fût-ce qu’à toi ; ne fût-ce qu’une heure avant d’en finir, sans retour peut-être, avec les hommes et avec Dieu !

— Doute de Dieu, doute des hommes, doute de moi-même, si tu veux, dit Sténio, en s’agenouillant devant elle, mais ne doute pas de l’amour : ne doute pas de ton cœur, Lélia ! Si tu dois mourir à présent, s’il faut que je te perde, ô mon tourment, ô mon bien, ô mon espoir ! fais au moins que je croie en toi, une heure, un instant. Hélas ! mourras-tu sans que je t’aie vue vivre ? Mourrai-je avec toi sans avoir embrassé en toi autre chose qu’un rêve ? Mon Dieu ! n’y a-t-il d’amour que dans le cœur qui désire, que dans l’imagination qui souffre, que dans les songes qui nous bercent durant les nuits solitaires ? Est-ce un souffle insaisissable ? Est-ce un météore qui brille et qui meurt ? Est-ce un mot ? Qu’est-ce que c’est, mon Dieu ! Ô ciel, ô femme ! ne me l’apprendrez-vous pas ?