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Cependant, je me suis fait toute ma vie un niveau au moyen duquel j’ai jugé sans me tromper à la longue, les caractères les plus compliqués. Je ne me souviens pas d’avoir rencontré d’exception à cette règle : « Cédant à la bonté, donc bon. Cédant à la dureté, donc lâche. »

À l’instant même, je viens de réprimander une personne que je crois bonne nu fond, mais me voilà certain qu’elle manque de véritable dignité. Quand je lui disais des paroles sévères et mortifiantes, elle montrait du repentir, de la tendresse, des bonnes résolutions ; quand, me laissant attendrir par cette douceur, je m’exprimais moi-même avec douceur et bonté, elle redevenait aigre, opiniâtre, presque insolente.

Hélas ! Mon Dieu ! j’ai pourtant porté des jougs de fer et tant qu’on me les a imposés au nom de la tendresse et au moyen d’une affectueuse persuasion, j’ai plié aveuglément sous la main amie. Mais quand on s’est lassé de me persuader et qu’on a voulu me commander, quand on a réclamé ma soumission, non plus au nom de l’amour et de l’amitié, mais eu vertu d’un droit, ou d’un pouvoir, j’ai retrouvé cette force que personne ne connaît en moi que moi ! Moi qui sais seul combien j’aime, combien je regrette, combien je souffre.

Piffoël, Piffoël, tu n’en dis rien, toi qui toujours ris, grondes, ou travailles. Toi qui prétends n’être