Page:Sand - Journal intime.pdf/38

Cette page n’a pas encore été corrigée

Vierge qui ne me ressemble pas absolument, Bon et heureux jeune homme ! Certes, s’il est ainsi, je l’estime et l’aime beaucoup, si c’est une affectation, cela m’est fort égal, car je ne le connais pas. Et quel besoin de le renvoyer dans tout cela ? Comment m’y prendrais-je, et quelle singulière raison lui donnerais-je ? D’ailleurs, j’ai une idée fixe, une seule et dernière espérance, bien modeste, pauvre George, pour toi qui fus si ambitieuse d’être aimée et que voici bien humble. Magdeleine sans cheveux, mais non pas sans larmes, sans croix et sans tête de mort ! Ce crâne que vous méditiez tristement, ô pauvre pécheresse, ne vous donnait certes pas une aussi rude et profonde leçon que celui qui est là sur ma table. Vous aimiez Jésus et il vous disait : « Il te sera pardonné parce que tu as aimé ! » Moi, j’aime, et on ne me pardonne pas. Ah, que je changerais bien ma chambre tapissée et ma robe de chambre pour votre désert et vos haillons, s’il m’était permis d’emporter la parole d’espoir et de pardon que votre Christ laisse tomber en vous souriant ! Le mien ne dit pas seulement :« Laissez approcher cette femme, laissez-la me laver les pieds !… »

Je vous disais, Buloz, que j’avais une idée fixe. Je veux ravoir son amitié, et un peu de son estime. Mais, pour cela, il me faut du temps, six mois peut-être au moins, peut-être encore plus. N’importe, fût-ce toute la vie ! Mais c’est la seule