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Parmi les mille grandes et excellentes raisons qu’on peut alléguer contre la doctrine d’individualisme absolu si fort à la mode en ces tristes jours, il y a une toute petite raison fondée sur un fait d’observation que je veux consigner ici.

Avez-vous rencontré une personne qui vous parût entièrement nouvelle et inconnue ? Quant à moi cela ne m’est jamais arrivé. Tout au contraire, au premier abord d’un individu que je il ai jamais vu, je crois le reconnaître, je cherche où j’ai pu le rencontrer, et je me demande ce qu’il y a de changé en lui a ce point de m’empêcher de trouver son nom. Je ne puis me défendre de chercher dans quel lieu et dans quelle occasion je l’ai vu déjà. Et quand je me suis assuré autant que possible que cela n’a jamais eu lieu, je cherche à quel autre individu de nui connaissance il doit ressembler pour m’avoir causé cette impression. Je le trouve parfois très vite, car il n’est pas d’homme qui n’ait une sorte de ménechme et à coup sûr plusieurs dans le monde. Car ce ménechme a le sien qui a le sien aussi, mais la plupart du temps, ils ne se connaissent point entre eux. Voilà pourquoi il m’arrive aussi de ne pas trouver facilement à qui ressemble cet inconnu