Page:Sand - Journal d’un voyageur pendant la guerre.djvu/92

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mésanges affairées et jaseuses que nous ne dérangeons pas de leurs occupations. Ce serait un jour de bonheur, si l’on pouvait être heureux à présent. Est-ce qu’on le sera encore ? Il me semble qu’on ne le sera plus ; on aura perdu trop d’enfants, trop d’amis ! — Et puis on s’aperçoit qu’on pense à tout le monde comme à soi-même, que tout nous est famille dans cette pauvre France désolée et brisée !

Les nouvelles sont meilleures ce soir. Le Midi s’apaise, et sur le théâtre de la guerre on agit, on se défend. Et puis le temps a changé, les idées sont moins sombres. J’ai vu, à coup sûr, de la pluie pour demain dans les nuages, que j’arrive à très-bien connaître dans cette immensité de ciel déployée autour de nous. L’air était souple et doux tantôt ; à présent, un vent furieux s’élève : c’est le vent d’ouest. Il nous détend et nous porte à l’espérance.