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rables, dit succinctement la dépêche. Pertes pour qui ?


31 décembre 1870.


Toujours froid glacial. Nous sommes surpris par la visite de notre ami Sigismond avec son fils. Ils n’ont pas plus d’illusions que nous, et nous nous quittons en disant :

— Tout est perdu !

À minuit, j’embrasse mes enfants. Nous sommes encore vivants, encore ensemble. L’exécrable année est finie ; mais, selon toute apparence, nous entrons dans une pire.

Il est pourtant impossible que tant de malheur ne nous laisse pas quelque profit moral. Pour mon compte, je sens que mon esprit a fait un immense voyage. J’ignore encore ce qu’il y aura gagné ; mais je ne crois pas qu’il y ait perdu absolument son temps. Il a été obligé de faire de grands efforts pour se déprendre de certaines ardeurs d’espérance ; il en a eu de plus grands