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quelques erreurs de sa part ; mais tout à coup je m’avisai que ces erreurs étaient trop grosses pour n’être pas volontaires, et je me demandai si elle ne me faisait pas subir un examen à moi, Jean de la Roche, pour s’assurer des progrès que j’avais pu faire. Pour changer d’objet, j’allai lui chercher dans l’antichambre un gros bouquet de ménianthe que j’avais ramassé à son intention dans ma promenade du matin.

Elle fit une exclamation de joie et de surprise en voyant en grosse gerbe cette ravissante petite fleur, rare au pays, abondante seulement dans une certaine prairie baignée à point d’eau courante auprès du village.

— Vraiment, vous avez du goût d’avoir songé à cueillir ça ! s’écria-t-elle, et vous me faites là un vrai cadeau. J’aime tant les fleurs vivantes !

Elle se fit donner un vase rempli d’eau et y mit toute la gerbe, qu’elle voulut garder auprès d’elle sur la table pour la contempler à tout instant. Cet amour naïf de la nature me frappait en elle. La science n’avait rien desséché dans son âme ouverte à toute beauté, rien appauvri dans son œil d’artiste, aussi prompt à embrasser l’ensemble harmonieux des grandes choses que patient à poursuivre l’intérêt des détails microscopiques.