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Je suivis Catherine et je l’aidai même à faire le déjeuner. Elle était émerveillée de voir que je me rappelais la place de tous ces petits ustensiles, comme j’étais émerveillé moi-même de voir qu’elle n’eût pas varié d’une ligne dans ses habitudes d’ordre. Elle me mit au courant de tout ce qui concernait mon ancien entourage ; mais quand, faisant un grand effort sur moi-même, je lui demandai à qui appartenait maintenant la terre de Bellevue, elle me répondit qu’elle n’en savait rien, que c’était trop loin, qu’elle ne s’occupait pas des gens qui vivaient à huit ou dix lieues de la Roche, et qui d’ailleurs ne l’intéressaient pas : ces réponses évasives m’inquiétèrent.

— Au moins, lui dis-je, tu sais si la famille Butler a reparu dans le pays… si…

— Ils sont tous vivants, je sais cela, répondit-elle ; mais je ne sais pas autre chose.

Catherine avait vu mon désespoir, et elle en avait connu la cause. Elle haïssait Love Butler et son frère, auteurs de tous mes maux, disait-elle. Je n’étais pas surpris de voir que, comme au temps passé, elle n’aimât pas à me parler d’eux ; mais j’allai plus loin dans mes suppositions : Love devait être mariée. Je n’osai pas le demander. J’avais peur de l’apprendre, et pourtant je m’étais dit mille fois pour une que je devais la retrouver mariée, si je la retrouvais jamais.