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désolée. Ne viendrez-vous point à mon secours ?

— Comment, m’écriai-je, c’est vous qui m’invoquez quand je succombe, et qui me demandez mon aide pour m’anéantir ? Que voulez-vous donc que je fasse pour vous rendre ce bonheur que mon funeste amour vous a enlevé ? S’il faut me tuer, me voilà prêt ; mais, s’il faut vivre sans vous revoir, n’y comptez pas.

— Je ne veux pas, répondit-elle, que vous consentiez à vivre toujours sans me voir : je ne vous parle que d’une séparation de quelques mois, de quelques semaines peut-être ; donnez-moi le temps de guérir et de convaincre mon frère. Quant à vous tuer, songez à votre mère et à moi, et ne dites jamais de pareilles choses ; ce sont là de mauvaises paroles et de mauvaises idées. Voudriez-vous me laisser la honte et le repentir d’avoir aimé un lâche ?

— Le suicide n’est pas une chose si lâche que vous croyez ; ce qui est lâche, c’est de le présenter comme une menace. Je ne vous en parlerai plus, soyez tranquille ; mais vous, que parlez-vous de m’aimer ? Si vous m’aimiez, ne trouveriez-vous pas des forces suprêmes, des moyens de persuasion exceptionnels, prodigieux au besoin, pour détruire l’antipathie et la résistance d’un enfant ? Une mère est plus qu’un frère, mille fois plus sous tous les rapports : eh bien, moi, je vous affirme, je vous jure que si la mienne s’opposait à