si bon et si raisonnable ! Laissez passer quelques jours. Quand il sera bien portant, je le persuaderai, j’en réponds : il m’a toujours cédé après un peu de résistance, et ce n’est pas à dix ou onze ans que l’on a une volonté inébranlable. Mon père s’est levé aujourd’hui. Déjà il pense à travailler. Je l’en empêche. Présentez mes tendres respects à madame votre mère, et plaignez-moi un peu du chagrin que je vous cause.
Je passai une journée terrible. Les plus sinistres pressentiments m’assiégeaient : il me semblait que je ne devais plus revoir Love, que tout était fini entre nous.
Peu à peu je me calmai : sa lettre était si bonne, si confiante ! Je la montrai à ma mère, qui me rassura.
— Une personne si juste et si loyale, me dit-elle, ne cédera pas à l’injustice d’un enfant, et l’injustice d’un enfant est un caprice qui passe. Faites ce qu’elle vous dit : n’allez chez elle ni demain ni après-demain ; le jour suivant, nous irons ensemble. M. Butler n’ayant pu me rendre votre visite, sa maladie m’autorise à lui faire la mienne.
— Non, lui répondis-je, c’est bien assez que vous soyez compromise en ma personne. Je crains cet enfant, qui n’est pas un enfant comme les autres.