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réserve, c’est qu’il m’attendra six mois. Ce n’est pas avant six mois que je peux consentir à me marier.

— Six mois, c’est trop long, s’écria M. Louandre. Il passe trop d’eau sous le pont pendant six mois : j’entends par là les intrigues, les indiscrétions, les mensonges, les jalousies du dehors. Vous ne savez pas, chère enfant, toutes les mouches avides et venimeuses qui bourdonnent autour des fruits mûrs. Or, un mariage arrêté est un fruit mûr qu’il faut cueillir avant qu’il tombe. Disons trois mois, et même moins s’il est possible.

— Eh bien, reprit-elle, ne disons rien que ceci : mon père a besoin de moi pour finir un ouvrage qui le passionne : je suis son secrétaire, et personne ne peut me remplacer…

— Parce que vous êtes aussi savante que lui ! Nous savons cela, s’écria M. Louandre un peu à l’étourdie.

— Où prenez-vous cela ? répondit Love en jetant un regard inquiet sur les papiers du bureau et en rougissant beaucoup, avec une physionomie contrariée. Je ne sais qu’écrire sous sa dictée, mais il a une telle habitude de s’adresser à moi, que d’ici à longtemps il ne pourra rien faire avec un autre.

— Bah ! bah ! n’a-t-il pas l’illustre Junius, qui en sait long aussi, à ce qu’il paraît ?

— L’illustre Junius, répondit Love en souriant, sait