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jean ziska.

En attendant que Sigismond pût s’attaquer en personne à l’audacieuse insurrection des hussites, Ziska, poursuivant son œuvre, détruisit ou fit détruire par les nombreuses bandes de ses adhérents presque toutes les églises conventuelles et les monastères de la Bohême. On compte cinq cent cinquante de ces édifices dont il ne laissa pas pierre sur pierre. Les historiens catholiques ne tarissent pas en gémissements sur les funestes résultats de cette dévastation. Les pompeuses descriptions qu’il nous ont laissées de ces sanctuaires du luxe et de la paresse expliquent assez la rage d’un peuple laborieux et pauvre, et qui avait vu prélever sur son travail et sur ses besoins l’impôt exorbitant du clergé. Le monastère de la Cour royale, à Prague, avait sept chapelles, dont chacune était de la grandeur d’une église. Autour du jardin, on pouvait lire l’Écriture sainte sur les murailles, en majuscules, sur de belles planches, et les lettres grossissant toujours, à proportion de la hauteur de la muraille. Mais rien n’approchait de la magnificence des Bénédictins d’Opatowitz.

Leur couvent avait été fondé par Wratislas, premier roi de Bohême, au onzième siècle, et l’on n’y recevait que des personnes riches, à la condition qu’elles y apporteraient tous leurs biens. Il y avait là un certain trésor qui, depuis longtemps, alléchait ces vieux burgraves de l’intérieur, dont nous avons déjà parlé, brigands qui, sous prétexte de guerre ou de religion, avaient toujours flairé, et maintenant essayaient pour leur compte la conquête des couvents. Celui-là était le rêve d’un certain pillard, nommé Jean Miesteczki, qui ne cessait de rôder autour, attiré par la merveilleuse aventure de Charles IV, dont le pays avait gardé souvenance. Bien que cette chronique soit une disgression, fidèle à notre amour pour cette partie de l’histoire que nous appelons le coloris, nous la