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jean ziska.

sensé. Cachés au fond de leurs châteaux, ils n’étaient heureux que lorsqu’on les oubliait, et ne reparaissaient que malgré eux sur la scène, où on les rappelait aux jours du danger, comme de vieux drapeaux qu’on tire de la poussière.

Wenceslas, effrayé des troubles, s’enivrait pour se donner du cœur, dans sa forteresse de Tocznik au sommet d’une montagne du district de Podwester. Dès qu’il aperçut les députés, il eut peur et se barricada. On parvint cependant à en introduire quelques-uns auprès de lui, et ils le décidèrent à venir habiter Prague, où il se renferma dans la forteresse de Wyssehrad. C’était un pauvre porte-respect, que ce roi fainéant, abruti dans la débauche et naturellement poltron, bien qu’il eût parfois des velléités de cruauté et des heures de rage aveugle. Dès qu’il fut arrivé dans sa capitale, des députés de la ville vinrent lui demander des églises pour y enseigner le peuple à leur manière, et y donner la communion des subutraquistes[1]. Il leur demanda du temps pour y penser, et fit dire sous main à Nicolas, seigneur de Hussinetz, qui était à leur tête, qu’il filait là une corde pour se faire pendre. Les hussites de Prague insistèrent les armes à la main. Les conseillers du roi répondirent en son nom par des menaces. Le sénat fut alarmé de ces mutuelles dispositions ; mais Jean Ziska, chambellan de Wenceslas, apaisa l’affaire et retarda l’explosion, en disant au peuple, sur lequel il exerçait déjà une grande influence, qu’il fallait attendre l’issue du concile, et ses résolutions pour ou contre le hussitisme.

Il est temps de parler du redoutable aveugle Jean Ziska du calice. Il y a tant d’obscurité sur ses commen-

  1. Partisans de la communion sous les deux espèces. C’est ainsi qu’on appelait alors les calixtins ou hussites purs.