Hélas ! je vous rencontre en masque, courant le carnaval, comme si vous pouviez prendre quelque amusement…
Vous autres instituteurs d’enfants, vous commencez toujours par le blâme avant de réfléchir. Ne vous serait-il pas plus naturel de penser que j’ai pris un masque et que je cours toute la ville pour chercher plus à l’aise sans qu’on se défie de moi ? Le carnaval fut toujours une circonstance favorable aux amants, aux jaloux et aux voleurs.
Ouvrez-moi votre âme tout entière, seigneur Astolphe ; Gabrielle vous est-elle aussi chère que dans les premiers temps de votre union ?
Mon Dieu ! qu’ai-je donc fait pour qu’on en doute ? Vous voulez donc ajouter à mes chagrins ?
Dieu m’en préserve ! mais il m’a semblé, dans nos fréquents entretiens, qu’il se mêlait à votre affection pour elle des pensées d’une autre nature.
Lesquelles, selon vous ?
Ne vous irritez pas contre moi : je suis résolu à tout faire pour vous, vous le savez ; mais je ne puis vous prêter mon ministère ecclésiastique et légal sans être bien certain que Gabrielle n’aura point à s’en repentir. Vous voulez engager votre cousine à contracter avec vous, en secret, un mariage légitime : c’est une résolution que, dans mes idées religieuses, je ne puis qu’approuver ; mais, comme je dois songer à tout et envisager