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jean ziska.

qu’il n’ose pas seulement songer à entreprendre ; les bandes de soldats mercenaires réclamant en vain leur paie, et recevant pour dédommagement la permission de mettre le pays à feu et à sang ; et le jour des funérailles de Charles VI, où il ne restait pas un seul de ces princes pour accompagner son cercueil, le duc de Bedfort criant sur cette tombe maudite : « Vive le roi de France et d’Angleterre, Henri VI ! »

Eh bien, pendant cette agonie de la France, la Bohême présentait un spectacle non moins terrible, mais héroïque et grandiose. Une poignée de fanatiques invincibles repoussait les immenses armées de la Germanie ; les massacres et les incendies servaient du moins à tenter un grand coup, une œuvre patriotique ; et si la Bohême finit par succomber, ce fut avec autant de gloire que ces vaillantes gens de Gand, dont l’histoire est quasi contemporaine.


I


Wenceslas de Luxembourg régnait en Bohême. La France avait vu ce monarque grossier lorsqu’il était venu conférer à Reims avec les princes du saint-empire et les princes français pour l’exclusion de l’antipape Boniface. « Les mœurs bassement crapuleuses de Wenceslas choquèrent fort la cour de France, qui mettait au moins de l’élégance dans le libertinage : l’empereur était ivre dès le matin quand on allait le chercher pour les conférences[1]. » À l’époque du concile de Constance et du supplice de Jean Huss, il y avait quinze ans que Wenceslas n’était plus empereur. Son frère Sigismond avait réussi à le faire dépo-

  1. Henri Martin.