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tyre, la sublime générosité d’un tel effort. Et cependant Isidora n’était pas incapable d’un aussi grand sacrifice ; mais elle l’eût accompli autrement, et l’orage de sa passion vaincue eût fait trembler la terre sous ses pieds. Quel orage pourtant, que celui qui avait passé sur la tête d’Alice ! quelle tempête avait bouleversé tous les éléments de son être durant cette longue nuit dont le calme avait tant effrayé Jacques ! et il n’en avait pourtant pas coûté la vie à un brin d’herbe. Les sanglots d’Alice n’étaient pas sortis de sa poitrine ; ses soupirs n’avaient fait tomber aucune feuille de rose autour d’elle.

Je ne me suis pas promis d’écrire des événements, mais une histoire intime. Je ne finirai par aucun coup de théâtre, par aucun fait imprévu. Alice, Isidora, Jacques, réunis ce soir-là, et souvent depuis, tantôt dans le petit salon, tantôt sur la terrasse du jardin, tantôt dans la belle serre aux camélias, se guérirent peu à peu de leurs secrètes blessures. Isidora fut, chaque jour, plus belle, plus éloquente, plus vraie, plus rajeunie par un amour senti et partagé. Jacques fut, chaque jour, plus frappé et plus pénétré de cet amour qu’il avait tant pleuré, et qui lui revenait, suave et doux comme dans les premiers jours, auprès de Julie, ardent et fort comme il l’avait été aux heu-