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ne vous prend rien de ce qui n’est pas son salaire !

Mais quelle âpreté au salaire résulte de ce respect fanatique pour la propriété ! Elle ne me volerait pas un centime, mais elle ne ferait point trois pas pour moi sans me les taxer parcimonieusement. Avec quelle cruauté elle retient les nippes des malheureux qui habitent les mansardes voisines lorsqu’ils ne peuvent payer leur terme ! Je sais que cette cruauté lui est commandée ; mais quels sont donc alors les bourreaux qui font payer le loyer de ces demeures maudites ? et n’est-il pas honteux qu’on arme ainsi le frère contre le frère, le pauvre contre le pauvre ! Eh quoi ! les riches qui ont tout, qui paient si cher aux étages inférieurs, dans ces riches quartiers, ne suffisent pas pour le revenu de la maison, et on ne peut faire grâce au prolétaire qui n’a rien, de cinquante francs par an ! on ne peut pas même le chasser sans le dépouiller !

Ce matin on a saisi les haillons d’une pauvre ouvrière qui s’enfuyait : un châle qui ne vaut pas cinq francs, une robe qui n’en vaut pas trois ! Le froid qui règne n’a pas attendri les exécuteurs. J’ai racheté les haillons de l’infortunée. Mais de quoi sert que quelques êtres sensés aient l’intention de réparer tant de crimes ? Ceux-là sont pauvres. Demain, si