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rideau collé à ses vitres, il s’obstina à son tour à regarder, jusqu’à ce que le jour, s’épurant peu à peu, lui permit de reconnaître Alice. À n’en pouvoir douter, c’était elle qui, depuis une heure du matin jusqu’à quatre, avait ainsi marché sans relâche, sans distraction, et sans qu’aucune impression extérieure eût pu la déranger du problème intérieur qu’elle semblait occupée à résoudre. À mesure que le jour net et transparent qui précède le lever du soleil lui permettait de discerner les objets, Jacques voyait son attitude, sa démarche, les détails de son vêtement. Rien en elle n’annonçait le désordre de l’âme. Elle avait la même toilette de deuil qu’il lui avait vue la veille ; elle n’avait pas songé à mettre un châle : elle avait la tête nue. Ses cheveux bruns, séparés sur son beau front, ne paraissaient pas avoir été déroulés pour une tentative de sommeil. Son pas était encore ferme quoique un peu ralenti, ses bras croisés sur sa poitrine sans raideur et sans contraction violente. Enfin, lorsque le premier rayon du soleil vint dorer les plus hautes branches, elle s’arrêta au milieu de la terrasse et parut regarder attentivement la façade de la maison. Puis elle descendit les trois degrés et se dirigea vers la porte du petit salon d’été, sans avoir aperçu Jacques qui