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DE GRIBOUILLE

Gribouille en mangea avec plaisir, parce que cela lui rappelait son enfance ; mais tout aussitôt il se sentit accablé d’un grand sommeil, et il ne lui sembla plus voir ni entendre M. Bourdon que dans un rêve.

D’abord il lui sembla que M. Bourdon frappait sur l’écorce du chêne et que le chêne s’entr’ouvrait ; alors Gribouille vit dans l’intérieur de l’arbre une belle ruche d’abeilles avec tous ses gâteaux blonds et dorés, et toutes les abeilles, dans leurs cellules propres et succulentes, bien renfermées chacune chez soi. On entendait pourtant des voix mignardes qui babillaient dans toutes les chambres, et qui disaient : Amassons, amassons ; gardons, gardons ; refusons, refusons ; mordons, mordons. Mais une voix plus haute fit faire silence, en criant du fond de la ruche : Taisez-vous, taisez-vous, l’ennemi s’avance.

Alors M. Bourdon commença à bourdonner et à grimper le long de l’arbre, et à frapper de l’aile et de la patte à la cellule de la reine qui se barricadait et tirait ses verrous. M. Bourdon fit entendre une voix retentissante comme une trompe de chasse, et des milliers, des millions, des milliards de bourdons, de frelons et de guêpes parurent, d’abord comme un nuage dans le ciel, et bientôt comme une armée terrible qui se précipita sur la ruche. Les abeilles se décidèrent à sortir pour se défendre, et Gribouille