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mêmes de l’intelligence n’étaient rien devant lui sans la volonté du bien, et d’ailleurs cette intelligence innée, il la laissait tomber dans le cerveau d’un crocheteur tout aussi bien que dans celui d’un prince.

Je donnai des larmes à l’abandon de mes parens. Je les aimais. Ils étaient les fils de la sœur de mon père, mon père les avait chéris ; ma grand’mère les avait bénis ; ils avaient souri à mon enfance ; j’aimais certains de leurs enfans : Mme de la Roche-Aymon, fille de Réné ; Félicie, fille d’Auguste, adorable créature, morte à la fleur de l’âge, et son frère Léonce, d’un esprit charmant.

Mais je pris vite mon parti sur ce qui devait être rompu entre nous tous : les liens de l’affection et de la famille, non, certes, mais bien ceux de la solidarité d’opinion et de position.

Quant au beau mariage qu’ils devaient me procurer, je confesse que ce fut une grande satisfaction pour moi d’en être débarrassée. J’avais donné mon assentiment à une proposition de Mme de Pontcarré, que ma mère repoussa. Je vis que, d’une part, ma mère ne voudrait jamais de noblesse, que, de l’autre, la noblesse ne voulait plus de moi. Je me sentis enfin libre, par la force des choses, de rompre le vœu de ma grand’mère et de me marier selon mon cœur (comme avait fait mon père), le jour où je m’y sentirais portée.