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par ma chienne Velléda. Pourquoi non ? Ma férocité était bien connue. J’avais du plaisir à voir des bras cassés et des têtes fendues, et chaque fois qu’il y avait du sang à faire couler, Deschartres m’appelait pour m’en donner le divertissement.

Cela peut paraître exagéré. Je ne l’aurais pas cru moi-même, si, par la suite, je ne l’avais vu écrit. Il n’y a rien de plus bêtement méchant que l’habitant des petites villes. Il en est même divertissant, et quand ces folies m’étaient rapportées, j’en riais de bon cœur, ne me doutant guère qu’elles me causeraient plus tard de grands chagrins.

J’avais déjà subi, de la part de ces imbéciles, une petite persécution, dont j’avais triomphé. Au milieu de l’été, à l’époque où ma grand’mère était le mieux portante, j’avais dansé la bourrée sans encombre à la fête du village, en dépit de menaces qui avaient été faites contre moi à mon insu. Voici à quelle occasion :

Je voyais souvent une bonne vieille fille qui demeurait à un quart de lieue de chez moi, dans la campagne. C’était encore Deschartres qui m’y avait menée et qui la jugeait la plus honnête personne du monde. Je crois encore qu’il ne s’était pas trompé, car j’ai toujours vu cette bonne fille ou occupée de son vieux oncle, qui mourait d’une maladie de langueur et qu’elle soignait avec une piété vraiment filiale, ou vaquant