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la phase de sa vie dont j’avais été le témoin et le but ; j’y trouvais, à l’égard de ma mère, de ma sœur et de moi, quelques injustices irréfléchies ou involontaires, toujours réparées par de grands efforts sur elle-même et par de véritables sacrifices. Dans tout le reste, une longanimité sage, une douceur généreuse, une droiture parfaite, un désintéressement, un mépris du mensonge, une horreur du mal, une bienfaisance, une assistance de cœur pour tous, vraiment inépuisables, enfin les plus admirables qualités, les vertus chrétiennes les plus réelles.

Et ce qui couronnait cette noble carrière, c’était précisément cette faute dont elle avait voulu s’accuser avant de mourir. C’était cette douleur immense, inconsolable, qu’elle n’avait pu offrir à Dieu comme un hommage de soumission, mais qui ne l’avait pas empêchée de rester grande et généreuse avec tous ses semblables. Ah ! qu’elles me semblaient vénielles et pardonnables maintenant, ces crises d’amertume, ces paroles d’injustice, ces larmes de jalousie qui m’avaient tant fait souffrir dans mon plus jeune âge ! Comme je me sentais petite et personnelle, moi qui ne les avais pas pardonnées sur l’heure ! Avide de bonheur, indignée de souffrir, lâche dans mes muettes rancunes d’enfant, je n’avais pas compris ce que souffrait cette mère désespérée, et je m’étais comptée pour quelque chose, quand j’aurais dû deviner les profondes racines de son mal