Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/640

Cette page n’a pas encore été corrigée

Tout cela était à mes yeux une question de vie et de mort, à savoir, si après avoir compris tout ce que je pouvais me proposer à comprendre, j’irais à la vie du monde ou à la mort volontaire du cloître.

Il s’agit bien, pensais-je, de prouver ma vocation dans des bals et des parures comme on contraint Elisa à le faire ! Moi qui déteste ces choses par elles-mêmes, plus j’aurai vu les amusements puérils et supporté les fatigues du monde, moins je serai sûre que c’est mon zèle et non ma paresse qui me rejette dans la paix du monastère. Mon épreuve n’est donc pas là. (En ceci j’avais bien raison et ne me trompais pas sur moi-même.) Elle est dans l’examen de la vérité religieuse et morale. Si je résiste à toutes les objections du siècle, sous forme de raisonnement philosophique, ou sous forme d’imagination de poète, je saurai que je suis digne de me vouer à Dieu seul.

Si je voulais rendre compte de l’impression de chaque lecture et en dire les effets sur moi, j’entreprendrais là un livre de critique qui pourrait faire bien des volumes ; mais qui les lirait en ce temps-ci ? Et ne mourrais-je pas avant de l’avoir fini ?

D’ailleurs, le souvenir de tout cela n’est plus assez net en moi, et je risquerais de mettre mes impressions présentes dans mon récit du passé. Je ferai donc grâce aux gens pour qui j’écris des