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Les jésuites se piquaient d’envisager les trois faces de la perfection : religieuse, politique, sociale. Ils se trompaient ; leur institut même, par ses lois essentiellement théocratiques, et par son côté ésotérique, ne pouvait affranchir l’intelligence qu’en liant le corps, la conduite, les actions (per inde ac cadaver). Mais quelle doctrine a dégagé jusqu’ici le grand inconnu de cette triple recherche ?

Je demande pardon de cette digression un peu longue. Avouer de la prédilection pour les jésuites est, au temps où nous vivons, une affaire délicate. On risque fort, quand on a ce courage, d’être soupçonné de duplicité d’esprit. J’avoue que je ne m’embarrasse guère d’un tel soupçon.

Entre l’Imitation de Jésus-Christ et le Génie du Christianisme, je me trouvai donc dans de grandes perplexités, comme dans l’affaire de ma conduite chrétienne auprès de ma grand’mère philosophe. Dès qu’elle fut hors de danger, je demandai l’intervention du jésuite pour résoudre la difficulté nouvelle. Je me sentais attirée vers l’étude par une soif étrange, vers la poésie par un instinct passionné, vers l’examen par une foi superbe.

« Je crains que l’orgueil ne s’empare de moi, écrivais-je à l’abbé de Prémord. Il est encore temps pour moi de revenir sur mes pas, d’oublier toutes ces pompes de l’esprit dont ma grand’mère était avide, mais dont elle ne jouira plus et