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couvert d’un tapis vert pour un banc de gazon.

On permit à la petite classe de venir assister à nos représentations, et on enrôla quiconque voulut s’engager. La supérieure, qui aimait beaucoup à s’amuser, nous fit dire enfin un beau jour, qu’elle avait ouï conter des merveilles de notre théâtre, et qu’elle désirait y assister avec toute la communauté. Déjà la classe et Mme Eugénie avaient prolongé la récréation jusqu’à dix heures, et puis jusqu’à onze, les jours de spectacle. La supérieure la prolongea pour le jour en question jusqu’à minuit : c’est-à-dire qu’elle voulut un divertissement complet. Sa demande et sa permission furent accueillies avec transport. On se précipita sur moi : « Allons, l’auteur, allons, boute en train (c’était le dernier surnom qu’on m’avait donné), à l’œuvre ! Il nous faut un spectacle admirable : il nous faut six actes, en deux ou trois pièces. Il faut tenir notre public en haleine depuis huit heures jusqu’à minuit. C’est ton affaire, nous t’aiderons pour tout le reste ; mais pour cela, nous ne comptons que sur toi. »

La responsabilité qui pesait sur moi était grave. Il fallait faire rire la supérieure, mettre en gaîté les plus graves personnages de la communauté ; et pourtant il ne fallait pas aller trop loin, la moindre légèreté pouvait faire crier au scandale et faire fermer le théâtre. Quel désespoir