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être certaine que je l’aime aussi. Qui ne l’eût aimée ? Elle n’avait pas un seul défaut, pas un seul travers. À la voir si rieuse, si échevelée, si en l’air, on eût pu croire qu’elle ne pensait à rien, et cependant elle pensait toujours à vous être agréable ; elle vivait pour ainsi dire de l’affection qu’elle vous portait et du plaisir qu’elle voulait vous donner. Je la vois toujours entrant dans la classe dix fois par jour (car elle savait sortir de classe comme personne) et remuant sa jolie tête blonde à droite et à gauche pour me chercher. Elle était myope malgré ses beaux yeux. « Ma tante, disait-elle, où est donc ma tante ? qu’a-t-on fait de ma tante ? Mesdemoiselles, mesdemoiselles, qui a vu ma tante ? — Eh ! je suis là, lui disais-je. Viens donc auprès de moi.

— Ah ! c’est bien, ma tante ! Tu m’as gardé ma place à côté de toi. C’est bien, c’est bien, nous allons rire. Mais qu’est-ce que tu as, ma tante ? Tu as l’air soucieux, voyons, dis-moi ce que tu as ?

— Mais rien.

— En ce cas, ris donc, est-ce que tu t’ennuies ? Eh, oui, je parie ! Il y a au moins une heure que tu es tranquille. Viens, décampons ; j’ai découvert quelque chose de charmant. »

Et elle m’emmenait battre les buissons dans le jardin, ou les pavés dans le cloître, et elle avait toujours préparé quelque folle surprise