Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/440

Cette page n’a pas encore été corrigée

mes consolations, je ne fis pas la superbe. Je la priai de m’associer à ses regrets, d’être triste avec moi sans se gêner et de me parler d’Isabelle sans jamais craindre de lasser ma patience et mon affection. « Au fait, me dit Sophie en se jetant dans mes bras, je ne sais pas pourquoi nous t’avions traitée comme un enfant, Isabelle et moi. Tu as plus de cœur qu’on ne pense, et je te jure amitié sérieuse. Tu me permettras d’aimer Isabelle avant tout. Elle y a droit par ancienneté, mais après Isabelle, je sens que c’est toi que j’aime plus que tout le monde ici. »

J’acceptai joyeusement la part qui m’était faite, et je devins l’inséparable de Sophie. Elle fut toujours aimable et charmante : mais je dois dire que, pour l’élan du cœur et le dévoûment complet, je fis toujours les frais de cette amitié ; Sophie était exclusive malgré elle. Son âme ne pouvait se partager. Je l’accusai quelquefois d’ingratitude, puis je sentis que j’avais tort, et, sans la quitter d’une semelle, j’ouvris mon cœur à d’autres amitiés.

Mary partit pour un voyage en Angleterre. Elle devait revenir bientôt, et je ne m’en affectai pas beaucoup, parce que mon entrée à la grande classe nous avait beaucoup séparées, et qu’à son retour elle devait m’y rejoindre. Mais son absence se prolongea. Elle ne revint qu’au bout d’un an et pour rentrer à la petite classe. L’affection qui s’empara de moi me dédommagea de toutes ces