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ma malpropreté : j’ai eu l’air bête, et j’ai oublié de penser à quoi que ce soit, plus de deux cents fois par jour. J’ai dormi au catéchisme et j’ai ronflé à la messe ; j’ai dit que vous n’étiez pas beau, j’ai fait égoutter mon rat sur le voile de la mère Alippe, et je l’ai fait exprès. J’ai fait cette semaine au moins quinze pataquès en français et trente en anglais, j’ai brûlé mes souliers au poêle et j’ai infecté la classe. C’est ma faute, c’est ma faute, c’est ma très grande faute, etc. »

On voit combien nos méchancetés et nos impiétés étaient innocentes. Elles étaient pourtant sévèrement tancées quand Mlle D…… mettait la main sur ces écrits, qu’elle appelait licencieux et dangereux. La mère Alippe faisait semblant de se fâcher, punissait un peu, confisquait, et, j’en suis sûre, amusait l’ouvroir avec nos sottises.

Que chacun se rappelle comme il a ri de bon cœur, dans l’enfance, de choses qui, par elles-mêmes, n’étaient peut-être pas drôles du tout. Il n’en faut pas beaucoup pour les petites filles. Tout nous était sujet d’inextinguible risée : un nom estropié, une figure ridicule au parloir, un incident quelconque à l’église, le miaulement d’un chat, que sais-je ? Il y avait des paniques contagieuses comme les joies. Une petite criait pour une araignée ; aussitôt toute la classe criait sans savoir pourquoi. Un soir, à la prière, je ne sais ce qui se passa, personne n’a jamais pu le dire ; une de nous crie, sa voisine se lève, une