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de remplacer ce puissant levier de l’intelligence, selon lui, le fouet ! Il prenait avec lui les leçons d’allemand, de musique, de tout ce qu’il ne pouvait lui enseigner à lui seul, et il se faisait son répétiteur en l’absence des maîtres. Il se consacra même, par dévoûment, à faire des armes, et à lui faire étudier les passes entre les leçons du professeur. Mon père, qui était paresseux et d’une santé languissante à cette époque se réveillait un peu de sa torpeur à la salle d’armes ; mais quand Deschartres s’en mêlait, ce pauvre Deschartres qui avait le don de rendre ennuyeuses des choses plus intéressantes, l’enfant bâillait et s’endormait debout.

— Monsieur l’abbé, lui dit-il un jour naïvement et sans malice, est-ce que quand je me battrai pour tout de bon, ça m’amusera davantage ?

— Je ne le crois pas, mon ami, répondit Deschartres ; mais il se trompait. Mon père eut de bonne heure l’amour de la guerre et même la passion des batailles. Jamais il ne se sentait si à l’aise, si calme et si doucement remué intérieurement que dans une charge de cavalerie.

Mais ce futur brave fut d’abord un enfant débile et terriblement gâté.

On l’éleva, à la lettre, dans du coton, et comme il fit une maladie de croissance, on lui permit d’en venir à cet état d’indolence, qu’il sonnait un domestique pour lui faire ramasser son crayon ou sa plume.

Il en rappela bien, Dieu merci, et l’élan de la