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elle-même comme un chat, j’aurais barbouillé bien du papier avant de savoir signer mon nom, si je n’eusse pris le parti de chercher moi-même un moyen d’exprimer ma pensée par des signes quelconques. Je me sentais fort ennuyée de copier tous les jours un alphabet et de tracer des pleins et des déliés en caractères d’affiche. J’étais impatiente d’écrire des phrases, et, dans nos récréations qui étaient longues, comme on peut croire, je m’exerçais à écrire des lettres à Ursule, à Hippolyte et à ma mère. Mais je ne les montrais pas, dans la crainte qu’on ne me défendît de me gâter la main à cet exercice. Je vins bientôt à bout de me faire une orthographe à mon usage. Elle était très simplifiée et chargée d’hiéroglyphes. Ma grand’mère surprit une de ces lettres et la trouva fort drôle. Elle prétendit que c’était merveille de voir comme j’avais réussi à exprimer mes petites idées avec ces moyens barbares, et elle conseilla à ma mère de me laisser griffonner seule tant que je voudrais. Elle disait avec raison qu’on perd beaucoup de temps à vouloir donner une belle écriture aux enfans, et que pendant ce temps-là ils ne songent point à quoi sert l’écriture. Je fus donc livrée à mes propres recherches, et quand les pages du devoir étaient finies, je revenais à mon système naturel. Longtemps j’écrivis en lettres d’imprimerie, comme celles que je voyais dans les livres, et je ne me rappelle pas comment