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battu en elle pour se résigner à notre séparation ; mais cet amour n’était pas de la même nature que le mien. Il était plus tendre chez moi, plus passionné chez elle, et déjà elle me corrigeait vertement pour de petits méfaits que sa préoccupation avait laissés passer longtemps impunément, et dont, par conséquent, je ne me sentais pas coupable.

J’ai toujours été d’une déférence extrême avec elle, et elle disait toujours qu’il n’y avait pas au monde une personne plus douce et plus aimable que moi. Cela n’était vrai que pour elle. Je ne suis pas meilleure qu’une autre, mais j’étais véritablement bonne avec elle, et je lui obéissais sans pourtant la craindre, quelque rude qu’elle fût. Enfant insupportable avec les autres, j’étais soumise avec elle, parce que j’avais du plaisir à l’être. Elle était alors pour moi un oracle. C’était elle qui m’avait donné les premières notions de la vie, et elle me les avait données conformes aux besoins intellectuels que m’avait créés la nature. Mais, par distraction et par oubli, les enfans font souvent ce qu’on leur a défendu et ce qu’ils n’ont point résolu de faire. Elle me grondait et me frappait alors comme si ma désobéissance eût été volontaire, et je l’aimais tant que j’étais véritablement au désespoir de lui avoir déplu. Il ne me vint jamais à l’esprit dans ce temps-là qu’elle pût être injuste. Jamais je n’eus ni rancune ni aigreur contre elle.