de souvenirs tristes et délicieux ! aux bords du Rhin, l’année dernière, quels doux momens je passais auprès de toi ! Trop courts instans de bonheur, de combien de regrets vous êtes suivis ! À Marienwerder, je me suis promené aux bords de la Vistule, seul, en proie à mes chagrins, le cœur devoré de tristesse et d’inquiétude. Je voyais tout renaître dans la nature et mon ame était fermée au sentiment du bonheur. J’étais dans un endroit pareil à celui où tu avais si peur, près de Coblentz, où nous nous assîmes sur l’herbe et où je te pressais sur mon cœur pour te rassurer. Je me suis senti tout embrasé de ton souvenir, j’errais comme un fou, je te cherchais, je t’appelais en vain. Je me suis enfin assis fatigué et brisé de douleur, et au lieu de ma Sophie je n’ai trouvé sur ces tristes rivages que la solitude, l’inquiétude et la jalousie. Oui, la jalousie, je l’avoue ; moi aussi, de loin, je suis obsédé de fantômes ; mais je ne t’en parle pas de peur de t’offenser. Hélas ! quand la fatigue des marches et le bruit des batailles cessent un instant pour moi, je suis la proie de mille tourmens. Toutes les furies de la passion viennent m’obséder. J’éprouve toutes les angoisses, toutes les faiblesses de l’amour. Oh ! oui ! chère femme, je t’aime comme le premier jour ! Que nos enfans te parlent de moi sans cesse : ne te promène qu’avec eux ; qu’ils te retracent à toute heure nos sermens et notre union. Parle-leur
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