Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/446

Cette page n’a pas encore été corrigée

je t’aimerai moins parce que je vivrai dans le luxe et la dorure ! Et que tu es gentille, en même temps, de mépriser tout cela ! Mais, moi aussi, je déteste les grandeurs et les vanités, et l’ennui de ces plaisirs-là me ronge quand j’y suis, tu le sais bien. Tu sais bien avec quel empressement je m’y dérobe pour être tranquille avec toi dans un petit coin. C’est pour mon petit coin que je travaille, que je me bats, que j’accepte une récompense et que j’aspire à avoir un régiment, parce que, alors, tu ne me quitteras plus et que nous aurons un intérieur à nous, aussi tranquille, aussi simple, aussi intime que nous le souhaitons. Et puis, quand je mettrais un peu d’amour-propre à te montrer quelquefois, heureuse et brillante à mon bras, pour te venger des sots dédains de certaines gens à qui notre petit ménage faisait tant de pitié, où serait le mal ?

Je serais fier, je l’avoue, d’avoir été, moi seul, l’artisan de notre fortune et de n’avoir dû qu’à mon courage, à mon amour pour la patrie, ce que d’autres n’ont dû qu’à la faveur, à l’intrigue ou à la chimère de la naissance. J’en sais qui sont quelque chose, grâce au nom ou à la galanterie de leurs femmes : ma femme à moi aura d’autres titres.

Son amour fidèle et le mérite de son époux.

« Voilà la belle saison revenue. Que fais-tu, chère amie ? Ah ! que l’aspect d’une belle prairie ou d’un bois prêt à verdir remplit mon ame