Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/397

Cette page n’a pas encore été corrigée

pour Sophie le peu de succès de ses démarches pour son avancement. Cela ne me paraît pas prouvé, car mon père était compris dans une mesure de disgrace générale, concernant les états-majors. S’il est vrai qu’il eût pu faire faire une exception en sa faveur à force d’obsessions et de démarches, je ne lui en veux pas d’avoir été inhabile à ce genre de succès. Mais ma grand’mère, effrayée et irritée des insinuations que le plus tendre intérêt dictait à M. de Villeneuve, écrivit une lettre assez amère à son fils, ce qui lui donna un nouvel accès de fièvre. La réponse est pleine de tendresse et de douleur.

LETTRE III.

« 10 fructidor (août 1804).

« Je suis, dis-tu, ma bonne mère, un ingrat et un fou. Ingrat, jamais !

Fou, je le deviendrai peut-être, malade de corps et d’esprit comme me voilà. Ta lettre me fait beaucoup plus de mal que la réponse du ministre, car tu m’accuses de mon propre guignon, et tu voudrais que j’eusse fait des miracles pour le conjurer. Je n’en sais point faire, en fait de courbettes et d’intrigues. Ne t’en prends qu’à toi-même qui, de bonne heure, m’as enseigné à mépriser les courtisans. Si tu ne vivais pas depuis quelques années loin de Paris et retirée du monde, tu saurais que le nouveau régime est, sous ce rapport, pire que l’ancien, et tu ne me ferais pas un crime d’être