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plat ne fit avec moi le renchéri. Puis du punch… Et puis on a valsé. Et puis les aides-de-camp m’ont invité à souper avec ceux du général Tréguier, commandant de la place. Nous avons bu du vin de Champagne qui cassait tout, puis encore du punch, puis nous nous sommes un peu grisé, et puis on s’est séparé à minuit.

« Tu vois que n’ayant pas le sou, je vis comme un prince. L’état-major est très bien composé. Les aides-de-camp sont tous des jeunes gens fort aimables, et le citoyen de Caulaincourt m’a dit, de la part du général, que dans trois ou quatre mois je serais officier.

« On bat toujours les rebelles ; on a brûlé plusieurs villages entre Mons et Bruxelles. Cologne est tranquille…………………….

« Dis à ma bonne qu’il y a ici des places vacantes de vivandières, et que je lui en offre une. J’embrasse il signor Fugantini-Deschartres.

Débite-t-on toujours, dans nos environs, bien des platitudes sur mon absence ? Arrivent-ils à croire que je ne suis pas émigré, mais soldat ?

Tous nos bons paysans partent-ils ? Demandent-ils où je suis ? Il arrive ici une foule de conscrits. On les compte, on les enrégimente, on les conduit comme des moutons. Tous les matins, la rue de l’état-major en est remplie. Les uns chantent ; quelques-uns, pauvres enfans, ont la larme à l’œil. Je voudrais pouvoir les consoler ou leur donner ma gaîté.