les petites localités que dans les grandes. La bourgeoisie est aisée sans être opulente, elle n’a point de lutte à soutenir contre une noblesse arrogante, et rarement contre un prolétariat nécessiteux. Elle s’y développe donc dans un milieu fort favorable pour l’intelligence, quoique trop calme pour le cœur et trop froid pour l’imagination.
En 1798, mon père, lié avec une trentaine de jeunes gens des deux sexes, et lié intimement avec plusieurs, joua la comédie avec eux.
C’est une excellente étude que ce passe-temps-là, et je dirai ailleurs tout ce que j’y vois d’utile et de sérieux pour le développement intellectuel de la jeunesse. Il est vrai que les sociétés d’amateurs sont, comme les troupes d’acteurs de profession, divisées la plupart du temps par des prétentions ridicules et des rivalités mesquines.
C’est la faute des individus et non celle de l’art. Et comme, selon moi, le théâtre est l’art qui résume tous les autres, il n’est point de plus intéressante occupation que celle-là pour les loisirs d’une société d’amis. Il faudrait deux choses pour en faire un plaisir idéal : une bienveillance véritable qui imposerait silence à toute vanité jalouse, un véritable sentiment de l’art qui rendrait ces tentatives heureuses et instructives.
Il est à croire que ces deux conditions se trouvèrent réunies à La Châtre à l’époque que je raconte, car les essais réussirent fort bien, et