Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée

et quel sera le moyen d’empêcher que toute espèce de culte n’en soit pas souillée ?

Tout mon siècle a cherché et cherche encore. Je n’en sais pas plus long que mon siècle.[1]

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Pourquoi cette solitude qui avait franchi les plus vives années de ma jeunesse ne me convenait-elle plus, voilà ce que je n’ai pas dit et ce que je peux très bien dire.

L’être absent, je pourrais presque dire l’invisible, dont j’avais fait le troisième terme de mon

  1. Il y a quelques années, j’aurais volontiers admis en principe d’avenir, une religion d’État avec la liberté de discussion, et une loi de discipline dans cette même discussion. J’avoue que depuis j’ai varié dans cette croyance. Je n’ai pas admis intérieurement sans réserve la doctrine de liberté absolue ; mais j’ai trouvé dans les travaux socialistes de M. Émile de Girardin une si forte démonstration du droit de liberté individuelle, que j’ai besoin de chercher encore comment la liberté morale échappera à ses propres excès si l’on accorde à l’homme, dès l’enfance, le droit d’incrédulité absolue. Quand je dis chercher, je me vante. Que trouve-t-on à soi tout seul ? Le doute. J’aurais dû dire attendre. Les questions s’éclairent avec le temps par l’œuvre collective des esprits supérieurs, et cette œuvre-là est toujours collective en dépit des divergences apparentes. Il ne s’agit que d’avoir patience, et la lumière se fait. Ce qui la retarde beaucoup, c’est l’ardeur orgueilleuse que nous avons tous en ce monde, de prendre parti pour une des formes de la vérité. Il est bon que nous ayons cette ardeur, mais il est bon aussi qu’à certaines heures nous ayons la bonne foi de dire : Je ne sais pas.