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dans cette soumission aux arrêts du ciel, sans laquelle il nous faudrait le méconnaître et le maudire.

C’est que là revient toujours la terrible question : Pourquoi Dieu, faisant l’homme perfectible et capable de comprendre le beau et le bien, l’a-t-il fait si lentement perfectible, si difficilement attaché au bien et au beau ?

L’arrêt suprême de la sagesse nous répond par la bouche de tous les philosophes :

« Cette lenteur dont vous souffrez n’est pas perceptible dans l’immense durée des lois de l’ensemble. Celui qui vit dans l’éternité ne compte pas le temps, et vous qui avez une faible notion de l’éternité, vous vous laissez écraser par la sensation poignante du temps.

Oui sans doute, la succession de nos jours amers et variables nous opprime et détourne malgré nous notre esprit de la contemplation sereine de l’éternité. Ne rougissons pas trop de cette faiblesse. Elle puise sa source dans les entrailles de notre sensibilité. L’état douloureux de nos sociétés troublées et de notre civilisation en travail fait que cette sensibilité, cette faiblesse est peut-être la meilleure de nos forces. Elle est le déchirement de nos cœurs et la morale de notre vie. Celui qui, parfaitement calme et fort, recevrait sans souffrir les coups qui le frappent ne serait pas dans la vraie sagesse, car il n’aurait pas de raison pour ne pas regarder avec le