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l’idée de quitter Paris, son médecin, ses relations, son appartement même et son piano. C’était l’homme des habitudes impérieuses, et tout changement, si petit qu’il fût, était un événement terrible dans sa vie.

Je partis avec mes enfants, en lui disant que je passerais quelques jours à Perpignan, si je ne l’y trouvais pas ; et que s’il n’y venait pas au bout d’un certain délai, je passerais en Espagne. J’avais choisi Majorque sur la foi de personnes qui croyaient bien connaître le climat et les ressources du pays, et qui ne les connaissaient pas du tout.

Mendizabal, notre ami commun, un homme excellent autant que célèbre, devait se rendre à Madrid et accompagner Chopin jusqu’à la frontière, au cas où il donnerait suite à son rêve de voyage.

Je m’en allai donc avec mes enfants et une femme de chambre dans le courant de novembre. Je m’arrêtai le premier soir au Plessis, où j’embrassai avec joie ma mère Angèle et toute cette bonne et chère famille qui m’avait ouvert les bras quinze ans auparavant. Je trouvai les fillettes grandes, belles et mariées. Tonine, ma préférée, était à la fois superbe et charmante. Mon pauvre père James était goutteux et marchait sur des béquilles. J’embrassai le père et la fille pour la dernière fois ! Tonine devait mourir