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deux journées de préparatifs, le ministre, M. Barthe, avait eu l’obligeance de faire jouer le télégraphe : je savais où était ma fille.

Madame Dudevant était morte un mois auparavant. Elle n’avait pu frustrer mon mari de l’héritage de son père. Elle lui laissait quelques charges qui lui valurent une douzaine de procès et la terre de Guillery, dont il avait déjà pris possession. Que Dieu fasse paix à cette malheureuse femme ! Elle avait été bien coupable envers moi, bien plus que je ne veux le dire. Faisons grâce aux morts ! Ils deviennent meilleurs, je l’espère, dans un monde meilleur. Si les justes ressentiments de celui-ci peuvent leur en retarder l’accès, il y a longtemps que j’ai crié :

« Ouvrez-lui, mon Dieu. »

Et que savons-nous du repentir au lendemain de la mort ? Les orthodoxes disent qu’un instant de contrition parfaite peut laver l’âme de toutes ses souillures, même au seuil de l’éternité. Je le crois avec eux : mais pourquoi veulent-ils qu’aussitôt après la séparation de l’âme et du corps, cette douleur du péché, cette expiation suprême, cesse d’être possible ? Est-ce que l’âme a perdu, selon eux, sa lumière et sa vie en montant vers le tribunal où Dieu l’appelle pour la juger ? Ils ne sont point conséquents, ces catholiques qui regardent la misérable épreuve de cette vie comme définitive, puisqu’ils admettent un purgatoire où l’on pleure, où l’on se repent, où l’on prie.