Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/528

Cette page n’a pas encore été corrigée

avec Eugène Sue, le baron d’Ekstein, Chopin, Mickiewicz, Nourrit, Victor Schœlcher, etc. Mes amis devinrent aussi les siens. Elle connaissait de son côté M. Lamennais, Pierre Leroux, Henri Heine, etc. Son salon improvisé dans une auberge était donc une réunion d’élite qu’elle présidait avec une grâce exquise, et où elle se trouvait à la hauteur de toutes les spécialités éminentes par l’étendue de son esprit et la variété de ses facultés à la fois poétiques et sérieuses.

On faisait là d’admirable musique, et, dans l’intervalle, on pouvait s’instruire en écoutant causer. Elle voyait aussi Mme Marliani, notre amie commune, tête passionnée, cœur maternel, destinée malheureuse parce qu’elle voulut trop faire plier la vie réelle devant l’idéal de son imagination et les exigences de sa sensibilité.

Ce n’est pas ici le lieu d’une appréciation détaillée des diverses sommités intellectuelles qu’à partir de cette époque j’ai plus ou moins abordées. Il me faudrait embrasser chacune d’elles dans une synthèse qui me détournerait trop quant à présent de ma propre histoire. Cela serait beaucoup plus intéressant, à coup sûr, et pour moi-même et pour les autres, mais j’approche de la limite qui m’est fixée, et je vois qu’il me reste, si Dieu me prête vie, beaucoup de riches sujets pour un travail futur et peut-être pour un meilleur livre.