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le jour même, et, prenant seulement là le temps de dîner, nous repartîmes dans le même cabriolet, en poste, pour Bourges.

Éverard payait sa dette à la pairie. Il était en prison. La prison de ville est l’antique château des ducs de Bourgogne. Dans les ombres de la nuit, elle avait un grand caractère de force et de désolation. Nous gagnâmes un des geôliers, qui nous fit passer par une brèche et nous conduisit dans les ténèbres, à travers des galeries et des escaliers fantastiques. Il y eut un moment où, entendant le pas d’un surveillant, il me poussa dans une porte ouverte qu’il referma sur moi, tandis qu’il fourrait Rollinat je ne sais où, et se présentait seul au passage de son supérieur.

Je tirai de ma poche une des allumettes qui me servaient pour mes cigarettes, et je regardai où j’étais. Je me trouvais dans un cachot fort lugubre, situé au pied d’une tourelle. À deux pas de moi, un escalier souterrain à fleur de terre descendait dans les profondeurs des geôles. J’éteignis vite mon allumette, qui pouvait me trahir, et restai immobile, sachant le danger d’une promenade à tâtons dans cette retraite de mauvaise mine.

On m’y laissa bien un quart d’heure, qui me parut fort long. Enfin mon homme revint me délivrer, et nous pûmes gagner l’appartement où Éverard, averti par Gustave, nous attendait pour me donner consultation vers deux heures du matin.