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la belle et charmante Agasta, sa belle-sœur, l’excellente Félicie, toutes deux pleines d’intelligence et de cœur, furent comme mes sœurs, à moi aussi. M. et Madame Desages (cette dernière était la propre sœur de Duteil) demeuraient dans la même maison, au rez-de-chaussée. Nous étions réunis tous les soirs quatorze, dont sept enfans[1]. Charles et Eugénie Duvernet, Alphonse et Laure Fleury, Planet, désormais fixé à La Châtre, Gustave Papet quand il quittait Paris, et quelques autres personnes de la famille Duteil, venaient se joindre à nous fort souvent, et nous organisions pour les enfans des charades en action, des travestissemens, des danses et des jeux bien véritablement innocens, qui leur mettaient l’âme en joie. C’est si bon, le rire inextinguible de ces heureuses créatures ! Ils mettent tant d’ardeur et de bonne foi dans les émotions du jeu ! Je redevenais encore une fois enfant moi-même, traînant tous leurs cœurs après moi. Ah ! oui, c’était là mon empire et ma vocation, j’aurais dû être bonne d’enfans ou maîtresse d’école.

À dix heures la marmaille allait se coucher, à onze heures le reste de la famille se séparait. Félicie, bonne pour moi comme un ange, me préparait ma table de travail et mon petit souper ; elle couchait sa sœur Agasta, qui était atteinte

  1. Un de ces enfans, Luc Desages est devenu le disciple et le gendre de Pierre Leroux.