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de sa propre existence, dans le découragement de l’avenir et dans les irrésolutions de la conscience.

Cela eût été bon à une nature forte et par conséquent modérée : cela était mauvais à une nature qui n’était qu’ardente et qui passait rapidement d’un excès à l’autre. Il s’écriait alors que j’avais l’inexorable vérité pour moi, que j’étais plus philosophe et plus éclairée que lui, qu’il était un malheureux poète toujours trompé par des chimères. Que sais-je ? Cette cervelle impressionnable, cet esprit naïf dans la modestie autant qu’il était sophistique et impérieux dans l’orgueil, ne connaissait de terme moyen à aucune chose. Il parlait de quitter sa carrière politique, sa profession, ses affaires, et de se retirer dans sa petite propriété pour lire des poètes et des philosophes à l’ombre des saules et au murmure de l’eau.

Il me fallait alors lui remonter le moral, lui dire qu’il poussait ma logique jusqu’à l’absurde, lui rappeler les belles et excellentes raisons qu’il m’avait données pour me tirer de ma propre apathie, raisons qui m’avaient persuadée et depuis lesquelles je ne parlais plus sans respect de la mission révolutionnaire et de l’œuvre démocratique.

Nous n’avions plus de querelles sur le babouvisme. Il avait quitté ce système pour en creuser un autre. Il relisait Montesquieu. Il était modéré en politique pour le moment, car je l’ai toujours