Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/467

Cette page n’a pas encore été corrigée

propre action, ses propres instincts, savoir, en un mot, où il allait.

Un jour que nous avions causé longtemps ensemble, moi lui demandant précisément ce qu’il me demandait, et tous deux reconnaissant que nous ne saisissions pas bien le lien de la révolution faite avec celle que nous voudrions faire, il me vint une idée lumineuse.

« J’ai ouï dire à Sainte-Beuve, lui dis-je, qu’il y avait deux hommes dont l’intelligence supérieure avait creusé et éclairé particulièrement ce problème dans une tendance qui répondait à mes aspirations et qui calmerait mes doutes et mes inquiétudes. Ils se trouvent, par la force des choses et par la loi du temps, plus avancés que M. Lamennais, parce qu’ils n’ont pas été retardés comme lui par les empêchemens du catholicisme. Ils sont d’accord sur les points essentiels de leur croyance, et ils ont autour d’eux une école de sympathies qui entretient dans l’ardeur de leurs travaux. Ces deux hommes sont Pierre Leroux et Jean Reynaud. Quand Sainte-Beuve me voyait tourmentée des désespérances de Lélia, il me disait de chercher vers eux la lumière, et il m’a proposé de m’amener ces savans médecins de l’intelligence. Mais, moi je n’ai pas voulu, parce que je n’ai pas osé : je suis trop ignorante pour les comprendre, trop bornée pour les juger, et trop timide pour leur exposer mes doutes intérieurs. Cependant, il se trouve que Pierre