Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/458

Cette page n’a pas encore été corrigée

L’enfant israélite Puzzi, élève de Liszt, musicien ensuite sous son vrai nom d’Herman, aujourd’hui carme déchaussé sous le nom de frère Augustin, les accompagnait.

M. Lamennais, petit, maigre et souffreteux, n’avait qu’un faible souffle de vie dans la poitrine. Mais quel rayon dans sa tête ! Son nez était trop proéminant pour sa petite taille et pour sa figure étroite. Sans ce nez disproportionné, son visage eût été beau. L’œil clair lançait des flammes ; le front droit et sillonné de grands plis verticaux, indices d’ardeur dans la volonté, la bouche souriante et le masque mobile sous une apparence de contraction austère, c’était une tête fortement caractérisée pour la vie de renoncement, de contemplation et de prédication.

Toute sa personne, ses manières simples, ses mouvemens brusques, ses attitudes gauches, sa gaîté franche, ses obstinations emportées, ses soudaines bonhomies, tout en lui, jusqu’à ses gros habits propres, mais pauvres, et à ses bas bleus, sentait le cloarek breton.

Il ne fallait pas longtemps pour être saisi de respect et d’affection pour cette âme courageuse et candide. Il se révélait tout de suite et tout entier, brillant comme l’or et simple comme la nature.

En ces premiers jours où je le vis, il arrivait à Paris, et, malgré tant de vicissitudes passées, malgré plus d’un demi-siècle de douleurs, il redébutait