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inflexible. »

Je ne me permettrai de reprendre qu’un mot à cette excellente appréciation. Selon moi, Éverard ne se défendit pas, et je souffre encore en m’imaginant que, s’il fit bon marché des formes de sa provocation, ce fut peut-être sous l’impression de la critique que je lui avais faite de ces mêmes formes. Je trouvais, moi, et je me permettais de le lui dire, que la principale maladresse de son parti était la rudesse du langage et le ton acerbe des discussions. On revenait trop au vocabulaire des temps les plus aigris de la révolution ; on affectait de le faire, sans songer qu’un choix d’expression fort du cachet de son temps, paraît violent, par conséquent faible, à quarante ans de distance. J’admirais l’originalité de la parole d’Éverard, précisément parce qu’elle donnait une couleur, une physionomie nouvelle à ces choses du passé. Il sentait bien que là était sa puissance, et il riait de tout son cœur des vieilles formules et des déclamations banales. Mais en écrivant, il y retombait quelquefois sans en avoir conscience, et quand je le lui faisais remarquer, il en convenait modestement. Nous n’avions pourtant pas été d’accord sur ce point en rédigeant la lettre. Il avait défendu et maintenu sa version ; mais depuis, en l’entendant blâmer par d’autres, il s’en était dégoûté, et l’artiste dominant, par bouffées, l’homme de parti, il aurait voulu qu’une pièce destinée à faire tant de bruit fût un chef-d’œuvre de goût et d’éloquence.